Posez la question à n’importe quel Apprenti fraichement initié, il affirmera avec conviction que le chemin initiatique en Loge se termine par la consécration suprême : « devenir Vénérable Maître ». Il faut dire que cette fonction est à l’Apprenti ce que la mère poule est au poussin. C’est la première personne qu’il voit, trônant avec son maillet à la main. Il représente le pouvoir et l’autorité de sa « Loge Mère ». Durant tout son apprentissage, il n’aura de cesse que d’admirer cet être qui a tous pouvoirs. Nous avons tous plus ou moins rêvé de nous faire appeler Vénérable Maître avec déférence et respect. Il est naturel que cette fonction cristallise quelques fantasmes chez certains. Une fois arrivé à la fonction suprême de la Loge, des problèmes insoupçonnés apparaissent. Ils ne viennent pas toujours par là où on les attendait. La solitude du pouvoir amplifiant les sensations d’altitude à l’Orient, le Vénérable Maître est souvent très isolé. C’est donc dans un esprit de partage d’expérience que cet ouvrage abordera lesdites épreuves et tentera de proposer des solutions, ou du moins, des façons différentes d’envisager les choses. Car parfois les nœuds sont tellement forts qu’il est difficile de retrouver l’harmonie autrement qu’en séparant ou en mettant en sommeil la Loge. En résumé, le remède peut tuer le malade tant la pathologie est profondément ancrée.Rassembler ce qui est épars
Il est bien difficile de dynamiser un Atelier dont les tiraillements internes mobilisent l’énergie et l’esprit de toute la loge. C’est pourquoi, la première partie de ce Manuel sera consacrée à la remise en ligne, à la rectification et aux soins de la Loge. L’Apprenti démarre sa vie maçonnique par le travail de rectitude et de silence avant de pouvoir s’exprimer et de voyager. Il me semble qu’il en est de même avec la Loge. Il faut qu’elle soit saine pour pouvoir ensuite s’exprimer pleinement. C’est donc en seconde partie que seront abordées les techniques pour dynamiser et renforcer les effectifs. En résumé, on restaure l’équilibre et la bonne entente. Ensuite, on renforce les effectifs. Puis, on travaille sur les racines pour pérenniser l’Atelier et maintenir la stabilité aussi longtemps que possible. Toute la construction de ce livre reposera sur cette logique d’évolution.
Quelques chiffres
La France compte environ 180 000 maçons, dont 35 000 femmes, soit 20 % des effectifs. Il existe plus ou moins 5 000 loges maçonniques en France, pour un total approximatif de 300 Obédiences (il s’en créé et s’en détruit tous les mois, car certaines sont absolument microscopiques et ne représentent que l’égo de leur fondateur). Sachant que les 6 premières Grandes Loges françaises représentent à elles seules 85 % du total, les 294 restantes se partagent les 26 000 membres restants. Cette organisation typiquement gauloise nous permet de prendre conscience que nous ne sommes pas face à un bloc monolithique, mais bien devant un écosystème complexe. En revanche, la cellule appelée Loge est bien le tronc commun à tout cet ensemble. Nous allons justement travailler sur cet élément. Cette Loge est dite souveraine, car seule la Chambre du Milieu prend les décisions. Partant de ce principe communément reconnu, la tâche est simplifiée, car la majeure partie des problèmes de la Loge sera plus facilement identifiable. En effet, il est plus rare que les conflits viennent de l’extérieur. Si cela arrive, il s’agira de cas singuliers ou ponctuels.