J'ai gardé L'Empereur de rien en chantier pendant vingt-cinq ans. En 1975, je fis une lecture du premier texte à un groupe d'amis. J'attendais d'eux qu'ils me disent ce que signifiait cette extravagante histoire de deux jeunes garçons, Bouboule et Canelle, qui partaient de Belleville dans l'est parisien pour se rendre en Grèce et qui achevaient leurs aventures humaines et divines à mi-pente de l'Olympe chez une aubergiste née sous Périclès.
Nous avons beaucoup ri pendant les six heures que dura la lecture et nous en avons conclu qu'il s'agissait d'une histoire insensée. Il me semble à présent qu'il s'agit du plus sensé de mes écrits. Je m'y moquais avec allégresse de l'expression formelle de l'initiation en même temps que je lui consacrais une partie très importante de ma vie. Rien de plus lourd de sens qu'un tel dédoublement.
En devenant au fil des années une pièce de théâtre, la trame initiale s'est ramassée. Elle a gagné en comique, en signification et la cocasserie des situations amoureuses et initiatiques convient tout à fait à la scène.
Il me reste aujourd'hui à souhaiter que fusent à nouveau les rires libérateurs de 1975.